thomasvino
Le Salquenen avait déjà remporté deux titres (2007 et 2011) de « meilleur vigneron de Suisse » et le titre de « meilleur de la décennie » (2007-2016). Il a écrasé le Grand Prix du Vin Suisse 2018 avec un troisième titre de « meilleur caviste de l’année », en plus de trois titres par catégorie et du titre de meilleur vin blanc, pour le Heida Les Pyramides 2016. Mais derrière l’arbre solide, il y a quand même une forêt…
Il y a dix ans, on écrivait que le GPVS tournait en rond… Que dire aujourd’hui ? La sélection des six nominés dans les 13 catégories semblait de très grande qualité lorsque ces vins ont été dégustés à nouveau début août à Sierre par un jury ad hoc (dont l’auteur de ces lignes faisait partie). La liste signée par ce jury international composé d’une douzaine d’experts, dont des représentants des organisateurs Vinea et du magazine Vinum, confirme certaines valeurs établies du vin suisse.
Si l’on devait désigner le canton du chasselas, ce serait Vaud, qui cultive la plus grande surface du premier cépage blanc de Suisse. Bingo : deux chasselas vaudois arrivent en tête ex-aequo, un La Côte, le Château d’Etoy 2017, vinifié par Thierry Ciampi pour la Cave Jolimont (groupe Schenk), et un Lavaux, le Riex 2017, issu de la nouvelle cave de la Bourgeoisie de la ville de Fribourg. Le troisième a été le Bérolon Le Consul 2017 des frères Laurent et Nicolas Martin à Perroy. Le favori sur le papier, le Dézaley-Marsens Vase No 4 des frères Dubois à Cully (VD), s’est retrouvé à la quatrième place partagée, tout comme le seul Fendant, Dame de Sion, des Fils Charles Favre.
Dans le domaine du chasselas, on notera le titre de « meilleur vin bio de Suisse » remporté par Bertrand Favre du Domaine de Miolan à Choulex (GE) avec un 2017 non conventionnel et non filtré…
Régions modèles confirmées
Il en va de même pour le pinot noir, le cépage le plus planté en Suisse. Quelles sont les régions d’origine les plus connues ? Les Grisons, Neuchâtel et l’Argovie. Qui a le vent en poupe ces dernières années ? Trois dans cet ordre ! Le Maienfeld Levanti 2016 d’Andrea Davaz, propriétaire de Von Salis à Landquart (GR), surpasse le Cortaillod 2016 de la famille Porret, Domaine des Cèdres, à Cortaillod (NE), et en troisième position se trouve le domaine Alter Berg à Tegerfelden (AG) avec un vin en barrique de 2015.
Et s’il s’agissait de désigner un excellent gamay, La Côte vaudoise ou Genève ? Match bien vu, avec le 2017 du Domaine de Chantemerle, à Tartegnin (VD),vainqueur ex æquo avec le 2017 de Sarah Meylan, de La Vigne Blanche à Cologny (GE) et, surprise, en troisième position, un Dézaley Grand Cru 2016, des Frères Dubois, de Cully.
Et que dire du merlot ? Un vin tessinois, bien sûr, et même trois fois ! Le titre suprême pour Daniele Mafei, vice-président de Vinea et directeur du domaine cantonal de Mezzana, et son jeune œnologue Nicola Calmi avec le Ronco 2016, devant le Pergole 2015 des frères Meroni à Biasca et le Lamone 2015 de Sacha Pelossi (qui vient de signer le dernier millésime du concept Magnificients).
Un Gamaret vaudois, meilleur vin rouge
Nouvelle catégorie chez les rouges, réservée aux triplés Gamaret, Garanoir et Mara, vinifiés en pur. Rodrigo Banto, de la Cave de La Côte à Tolochenaz, s’impose avec son Gamaret Inspiration 2015, élu à juste titre meilleur vin rouge de Suisse. Ses dauphins sont un Gamaret de Sierre 2016 de la Colline de Daval et un Garanoir 2017 du Domaine de Miolan à Choulex (GE).
La finale a été 100% valaisanne pour les « autres cépages purs », et ce sont deux cornalins haut de gamme, le Champmarais 2014 de Jean-René Germanier à Vétroz et la Grande Réserve 2015 de Joël Briguet, Cave La Romaine, à Flanthey, qui ont pris les 1ère et 3ème places, avec en deuxième position un Humagne Réserve rouge des Administrateurs de la Cave St-Pierre, à Chamoson (groupe Schenk), qui a servi d’arbitre.
Les assemblages rouges font coup double pour la « Cave de l’année » : la cuvée Rosmarie Mathier 2015 s’impose devant le Folissimo 2015, et le prix de consolation revient au Métissage 2016 de la Cave de Chambleau à Colombier (NE). Diego Mathier fait encore mieux dans les assemblages blancs avec L’Ambassadeur de Domaine Diego Mathier, vainqueur avec le millésime 2016 et troisième avec le 2015 : l’ancien meilleur vigneron de l’année 2009, Stefan Gysel de Schaffhouse, parvient à s’interposer avec son Pinot Blanc – Chardonnay 2016. La cave de Salquenen s’impose chez les « autres cépages blancs purs » avec le « meilleur vin blanc de Suisse », le Heida Les Pyramides 2016, et coiffe pour un podium tout à fait valaisan deux Petite Arvines, l’une, le 2017 de Defayes-Crettenand à Leytron, l’autre, le Maître de Chais 2017, de la coopérative Provins.
Six champions valaisans dans 13 catégories
En Müller-Thurgau, un domaine germanophone, c’est un cru argovien qui s’est imposé, le Riesling X Sylvaner 2017 de Tegerfelden de DiVino (nouvelle marque du groupe Garnier-Volg), devant le Siebe Dupf 2017 de Bâle-Campagne, de la cave du même nom à Liestal, et le Nobler Weisser de la Zurichoise Nadine Saxer à Neftenbach.
Dans les autres catégories, La Côte vaudoise s’est imposée avec le meilleur rosé, un 2017, toujours de Tartegnin, décidément « pays du bon vin », de la Cave de la Brazière, devant le nouveau venu de la collection Les Murailles, le rosé 2017 de Badoux à Aigle (groupe Schenk), et en troisième position, un outsider du Tessin, Confessore 2017, de Chiericati à Bellinzone.
Les vins liquoreux ont à nouveau connu un podium valaisan, la maison Gilliard à Sion ayant réalisé un bon coup avec son Soleil de Minuit 2016. Il a remporté le trophée devant deux spécialistes, Robert Taramarcaz du Domaine des Muses à Sierre avec une Petite Arvine flétrie Classique 2014 et Yvon Cheseaux de la Cave des Remparts à Saillon qui produit la meilleure Malvoisie flétrie (son 2016 est 3e).
Autre vin valaisan victorieux (sept catégories sur treize) chez les vins effervescents, où la concurrence neuchâteloise semblait pourtant redoutable. Le seul vin qui avait la complexité d’un champagne s’est imposé : l’Eboé 2013, un chardonnay de Flaction Vins à Saint-Pierre-de-Clages. Il a mis d’accord les caves Châtenay-Bouvier à Boudry, 2ème avec son Bouvier Brut 2014, et Mauler & Cie à Môtiers, 3ème avec son Bel Héritage 2012, un vin de pays suisse, tandis que sa cuvée neuchâteloise Louis Edouard Mauler 2011 a pris la 4ème place partagée, tout comme l’autre nominé neuchâtelois et seul rosé, le Brut Signature de Bouvet-Jabloir à Auvernier.
Avec une large domination des Valaisans, des Vaudois et des Neuchâtelois, qui s’en sortent mieux que les Genevois et les Tessinois, attachés à leur merlot, ce Grand Prix du Vin Suisse 2018 dessine un paysage viticole suisse classique, sans réelle surprise.
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